Semi-pétage de plombs
Eh oui, même chez un lymphatique comme moi ça peut arriver.
Je supporte pas mal de trucs, étant ce qu'on appelle communément de bonne composition. Ayant de plus une tendance ô combien salutaire dans ce métier à tout prendre au second degré, je ne crois pas être de ces enseignants qui sortent facilement de leurs gonds.
Mais s'il y a bien un truc que je ne supporte pas, c'est la lâcheté, la fourberie, l'hypocrisie, les gens qui agissent par derrière et qui font les innocents. Eux je les nique, en bonne et due forme.
Or, j'ai le cas dans une de mes classes. Deux gamins pénibles, le premier parce qu'il est bête et pas très malin: je le supporte et le recadre quand j'en ressens le besoin, et le second, objet de ce post. Ce gosse est arrivé deux semaines après la rentrée, viré du collège précédent pour une sombre histoire de mâchoire de petit camarade cassée suite à une franche discussion...
Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il a pris son temps avant de commencer. Je le trouvais calme, discret, le genre de calme qui n'augure rien de bon. Au niveau des résultats, pas de problème: un bon élève. Mais un esprit de merde. L'ami Sylvain n'a commencé que la semaine dernière à se manifester... en tapant des pieds par terre alors que j'écrivais au tableau. En me retournant un peu rapidement, je crois l'avoir surpris. Manque de preuve, je ne l'ai pas épinglé et me suis contenté de dicter le cours "à cause de l'imbécile qui s'amusait à faire des claquettes." Le message a été reçu, plus de bruit depuis, jusqu'à ce midi où monsieur faisait régulièrement tomber son stylo en voulant le faire tourner. Une remarque désagréable a suffi. L'avantage c'est que je crois avoir la classe avec moi.
Et tout à l'heure, de quatre à cinq, je faisais cours avec mes cinquièmes, les gentils, ceux-là. Une salle située en rez de chaussée, qui donne sur la cour. Et qui vois-je qui s'amuse à mater les cours d'un gamin, le nez collé à la fenêtre ?
Sylvain.
Mon sang n'a fait qu'un tour (ce qui me fait dire, rétrospectivement, que je commence à accumuler pas mal de fatigue: le moindre truc me met hors de moi), et j'ai bondi à la fenêtre pour pourrir Sylvain, devant ses pote, bien comme il faut. Regard baissé, fuyant au début, il a vite voulu couper court par un "ouais c'est bon...", et il a fallu que je lui gueule dessus pour qu'il daigne me regarder dans les yeux. Fin de l'engueulade, je reprends mon cours face à ma cinquième, médusée de me voir en colère.
A la fin du cours, je pars comme une balle et j'alpague le Sylvain à la sortie, où je lui ai mis une seconde couche, en lui disant clairement que je détestais son attitude, son mépris et son arrogance, et que l'affaire serait mise sur la table le lendemain, en réunion parents-profs. Il m'a semblé avoir les larmes aux yeux. Je l'espère bien, d'autant plus que je ne suis pas le seul à me plaindre de lui.
Donc bilan demain avec les parents. D'ici là le soufflé sera retombé, et j'espère que tout se goupillera bien.