Alors, hier j'étais de réserve pour les
Alors, hier j'étais de réserve pour les surveillances. De réserve, ça veut dire que tu bouges ton c.. pour 8h, que tu viens jusqu'au lycée pour remplacer celui qui ne se sera pas levé. N'étant qu'un jeune stagiaire débutant, je n'osais croire que de méchants collègues eussent pu me faire un coup pareil et ternir la réputation exemplaire de la ponctualité enseignante par une telle félonie (mais quand même, je pris mes affaires pour travailler).
Ben si.
Je me suis fait avoir: paf, 3h de surveillance, des STG qui passaient les maths. Du coup, j'ai pris le parti de ren-ta-bi-li-ser. Adoncques je me suis calé au fond de la salle avec mon Macbook (oui, je me la pète, et alors ?) et mes descriptifs du bac français. Et j'ai tapé tous mes descriptifs, les cinquante problématiques des textes sur lesquels je vais faire plancher les petits bacheliers muets d"effroi durant la semaine prochaine. Ca donne à peu près ça:
Séquence 4 (« S’interroger sur la condition humaine par le biais du roman malrucien »), texte 5 (« fin du roman »)
Texte sélectionné : André Malraux, La Condition humaine, 1933, « Cinquante sirènes…ses bras inhumains. » (NB : extrait du roman hors programme)
Problématique retenue : En quoi ce passage montre-t-il un apaisement qui semble inclure, par delà le bien et le mal, tous les actes humains ?
Comme j'aime les choses organisées (et que non, je ne suis pas un psychorigide), tout sera prêt, j'aurai mon petit bordel, mes petits tas, mes trucs et mes machins. John a tout à fait raison: le bac ne sert plus à rien maintenant, ce n'est qu'un rituel de passage, une épreuve commune dont tout le monde pourra se rappeler plus tard. Se pointer dans un endroit inconnu, avec un prof inconnu qui va vous ramasser la tronche, flipper un un bon coup, stresser quelques jours en étant persuadé de s'être planté... Se confronter à ce qu'on croit être un vrai échec est important, dans ce parcours scolaire où il suffit de bosser un minimum pour arriver. C'est une première confrontation, une épreuve officielle plus importante que le brevet.
Donc je prends ça au sérieux, d'autant plus que j'adore faire passer des oraux. Peut-être en serai-je dégoûté le 8, mais pour le moment il me tarde d'y être. C'est d'autant plus drôle qu'étant ami sur Facebook avec une collègue du lycée qui a une partie des élèves que je vais faire passer, j'ai pu apercevoir leur tronche. Ils font les beaux...pour le moment.
Mais rassurez-vous: je suis effroyablement désagréable pendant l'épreuve, mais très cool au niveau des notes. Et puis pouvoir dire plus tard qu'on est passé à l'oral du bac sur du Malraux, du Céline ou du Pascal, ça n'a pas de prix non ?
Le goûter de fin d'année
Ca y est, on peut dire que l'année scolaire est terminée. Ma première année scolaire complète en tant qu'enseignant, la première vraie. Parce que la première vraie de vraie sera l'an prochain, une année débarrassée des conneries d'IUFM et autres formations bidon.
Pour le coup, peut-être est-ce l'innocence gentillette de ma première sortie des cours, mais j'avais préparé un petit goûter à l'attention des élèves qui ont daigné m'honorer de leur présence. Je n'ai pu m'empêcher, au passage, de les faire mariner:
"Kévin: Allez, m'sieur, c'est le dernier jour, on va pas travailler quand même !
Jules, le regard noir et le cartable impeccable: Pardon ? Est-ce que j'ai une tête à faire des goûters ou des belotes moi ?!
Kévin: ..."
Et pour les faire galérer, je les ai soûlés pendant une demi-heure sur les épreuves du bac de l'an prochain. Avant de conclure: "bon, je crois que l'on a terminé pour cette année. Je vous remercie blablabla, j'ai été très heureux blablabla, j'espère avoir de vos nouvelles blablabla et voici, pour ce faire, mon email. Enfin, pour vous récompenser et pour trinquer aux vacances, voici le goûter !"
C'est ti pas mignon ça ?
Et on a terminé l'heure en discutant avec des bombecs et du Coca. Quand l'heure fut passée, je leur ai dit, encore, au revoir, et ils partirent, tongs aux pieds, auréolés de mon estime. Je doute que je les reverrai au lycée la semaine prochaine, mais je pense que j'en croiserai pas mal à Perpignan, et j'espère que certains, 2 ou 3 en particulier, me donneront de leurs nouvelles.
Bou, ça fait bizarre. Cette année aura été difficile, surtout les trois premiers mois. Mais j'ai quand même eu des élèves en or. Ils étaient sympa, tout simplement. Sympas et pas idiots, on pouvait parler avec eux. Ils faisaient les cons, ils discutaient, ils rigolaient, mais ils étaient aussi facilement recadrables. De fait, les vrais clashes furent assez rares: 4 ou 5, pas plus. C'était, en fin de compte, ce qu'il fallait pour mettre un pied dans le métier dans de bonnes conditions: une demi-classe, des élèves agréables, un lycée qui tient la route.
Je doute que ça dure, mais le début m'a presque fait aimer le métier.