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22 avril 2011

Marivaudage ronaldien

marivaux

Elle était chatain clair, serrée dans une robe noire ridiculement courte et incongrue par ce temps frais et humide qui couvrait le trou de balle du monde dans lequel se situe mon collège, elle était très maquillée,  bien qu'à la réflexion ce maquillage ne l'enlaidissait pas comme c'est si souvent le cas chez les jeunes femmes, elle était un peu forte sans pour autant être ce qu'on appelle aujourd'hui "ronde", elle avait des yeux bleus en amande et de jolies dents qui laissent deviner la femme qui sait ce qu'elle veut et quelle pomme mordre. Un piercing à la langue, aussi. Elle venait probablement manger dans ce Mc Do avec ses collègues de boulot parce qu'elle n'avaient pas eu le choix, prises par un horaire trop contraignant, car jamais elle ne se serait laissée traîner spontanément dans un de ces fast-foods merdiques.

Elle doit avoir dans les trente ans. Entre 27 et 30, j'aurais dit. Elle a pris une salade qu'elle mangeait lentement, tout en discutant avec ses collègues. Une voix cristalline, assez désagréable d'ailleurs. Peut-être est-ce dû au fait qu'elle était en train de parler en mal de quelqu'un d'absent. Je n'ai pas pu distinguer ce qu'elle disait, mais l'exclamation "quelle connasse !", qui s'est échappée de la bouche d'une de ses congénères, ainsi que le sourire indescriptible qu'elle affichait en parlant prouvait bien qu'elle ne pouvait pas ne pas parler d'autre chose. D'ailleurs, je me demande si je l'aurais remarquée si elle avait été en train de parler de quelque chose de banal, de ce qu'elle ferait ce week-end par exemple. Finalement, le fait de faire quelque chose de mal l'associait au mal, ou au péché, et la rendait de fait terriblement attirante, donnait envie de pécher. 

Quelqu'un de très antipathique, en somme, et d'ailleurs le genre de femme médisante, vulgaire et superficielle qui ne me plaît pas du tout. Mais là, hier midi en mangeant mon Big Mac avec mes collègues, j'ai vécu une expérience telle que je n'en avais pas eue depuis longtemps. Rien de vulgaire ou de malveillant, je vous l'assure. Le plaisir d'observer quelqu'un dans son naturel sans être aperçu et de pouvoir en parler, du mauvais Marivaux en somme. C'est dans les premières lettres du journal du philosophe, je crois, que le narrateur raconte avoir surpris sa petit amie en train de faire des mimiques devant un miroir. Tellement déçu de constater que ces moues charmantes n'étaient pas dûes au naturel mais à un savant travail d'actrice, il la quitta.
Donc hier, au Mac Do, se trouvait une délicieuse inclination au péché. Dici.

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22 avril 2011

Mea culpa

 

Bon, l'heure est grave, j'ai déconné et je m'en mords les doigts.
Recontextualisons l'une des plus vilaines soirées de ma vie, professionnellement parlant. Cela fait plus d'une fois que je parle de mon copain John, ami devant l'éternel en dépit de son métier de prof d'anglais, responsable de ça et vivant, roulant sur un beau vélo dont il ne s'est jamais servi et, comme si ça ne suffisait pas, en région parisienne. Non mais franchement. 
Ainsi, John redescend à chaque période de vacances, et à chaque période de vacances nous allons joyeusement nous soûler la gueule (les spécialistes apprécieront le chiasme), or il se trouve que ce soir là nous étions accompagnés par celui que nous appellerons Fulbert, professeur de mathématiques de nos amis, gai compagnon de beuverie au demeurant.
Or, il se trouve que nous avons croisé à la taverne une élève de terminale de Fulbert. L'élève et l'enseignant se sont salués avec déférence, échangés les trois banalités d'usage et souhaités une bonne soirée. Mais c'était sans compter sur ce saligaud de John qui, une fois avalées deux ou trois pintes, a commencé à draguer comme un gros sale cette jeune fille sous l'oeil atterré de Fulbert, et en l'absence du mien, dans la mesure où un coup de fil important m'avait tenu écarté de ce moment d'anthologie. Je ne suis revenu qu'au moment où John smackait délicieusement cette jeune fille après avoir détourné ignominieusement la tête. Bon, Fulbert était vert, mais ce fut une bonne soirée bien débile.
Le problème est que quelques jours plus tard, John et moi seuls traînant nos guêtres dans le même bar croisâmes à nouveau la jeune fille, et à nouveau avons-nous passé la soirée avec elle à déconner, jusqu'au moment où pour blaguer nous avons appelé Fulbert pour faire une blague débile de vil poivrot que nous étions.

Soit. Or depuis, et malgré mes plus plates excuses, renouvelées, Fulbert s'obstine à ne pas répondre à mes messages, à ne jamais décrocher le téléphone, à ne plus fréquenter nos apéros du vendredi, et Fulbert me manque. C'est un ami, et je trouve débile de faire la gueule comme ça pour une histoire qui, finalement, est stupide mais qui ne mérite peut-être pas pour entériner une amitié de plusieurs années.

Allez, mon Fulbert. Puisque tu ne me permets même plus de te parler, je te présente à nouveau mes excuses pour cette connerie. Tu peux me sermonner, m'engueuler, me faire payer toutes tes pintes jusqu'à la fin de l'année, mais ce silence, il est insupportable.

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