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27 décembre 2008

Papa, je ferai quoi plus tard avec mon DEA de lettres ?

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Tu seras caissière, et tu écriras des bouquins.
C'est en allant chercher un paquet de lessive (et oui, les plus grandes pensés prennent toujours leurs sources dans des actions quelque peu futiles !) que je suis tombé sur ce bouquin. Je n'ai pas 15 euros à foutre là-dedans, je me suis donc contenté de lire la quatrième de couverture avant de le remettre soigneusement à se place et de continuer, pensif, mes tribulations intermarchesques.
Le principe de ce bouquin n'est pas idiot, assez amusant même: une caissière de supermarché raconte toutes les anecdotes vécues en huit ans de travail. J'imagine bien volontiers qu'elle a dû en voir des vertes et des pas mûres, encore que je n'ai jamais eu l'occasion d'assister à un lynchage de caissière et que je n'ai pas trop dans mon imaginaire d'aversion pour ces professions. Tout au plus me dis-je que ça dit être super chiant comme boulot. Mais de là à ce qu'on fasse, comme on le fait trop souvent, des caissières et des caissiers le réceptacle, l'étalon de la bêtise humaine (qui est la chose du monde la mieux partagée), cette tendance me gêne un peu. C'est vrai après tout, il y a une métaphysique de la caissière: en épluchant avec son BIP toutes nos courses, elle passe en revue toute notre intimité: les culottes trop grandes, les yaourts pas bios, les capotes pudiquement rangées dans une petite boite...Peut-être qu'être désagréable avec la caissière n'est qu'une attitude de défense contre celle qui a vu défiler toutes nos affaires, y compris celles que l'on veut cacher. Une sorte de bouc émissaire, finalement.
Mais ce qui me dérange vraiment, c'est l'attitude de cette dame, que je n'ai pas l'heur de connaître, qui joue sur le refrain "regardez cette société qui n'est pas capable de considérer à sa juste valeur un DEA de lettres et qui ne me propose qu'un emploi de caissière." Loin de servir le monde des lettres, elle le rabaisse une fois de plus: en commençant un DEUG de lettres, tout étudiant doit savoir que les débouchés de cette voie sont peu nombreux. Les lettreux ne servent à rien, c'est un fait. Il me semble que le bon sens aurait dû présider au choix des études de cette jeune bachelière, d'autant plus que même si ces débouchés sont minimes, ils sont présents: journalisme, (nombreux) concours dans l'administration, enseignement, bibliothèques... Pour quelqu'un qui n'est pas bête, ce qui est certainement son cas, il est tout à fait possible de se faire une place. Je connais même quelqu'un qui se recycle, avec beaucoup de courage, de l'enseignement jusqu'au monde des bibliothèques. Par conséquent, il me semble (je modalise, car je ne connais pas les "tribulations" de cette Anna) que cette jeune dame se complait dans cet atermoiement, dans cette attitude de victime qui ne fait honneur ni à l'univers des caissières, car je suis persuadé qu'on peut être heureux en étant caissière, ni à celui des lettres.
Après tout, pendant cinq ans j'ai livré des pizzas, et j'ai toujours dans l'idée d'en écrire un petit bouquin, mais même si j'en ai chié, je ne me souviens pas avoir eu le désir de lâcher mes études pour cela. Cette étape ne fut qu'un passage qui m'a permis de devenir prof. Et puis c'est tout. Donc jouer sur ce crédo de la caissière incomprise est, pour moi, de la lâcheté.
Lisez quand même la quatrième de couverture, c'est assez édifiant.
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Commentaires
S
toi je te sens venir...ça sent la 4 fromages plein nez là ! Aldo...
K
Il n'est pas si facile de se recycler. Pour ma part, je voulais vraiment être prof. Depuis l'âge de 8 ans. Je te laisses imaginer la claque que je me suis prise en constatant que j'étais incapable d'enseigner. Après une formation en IUT métiers du livre, je recherche un emploi en bibliothèque. Malgré 6 entretiens depuis septembre, je n'ai toujours rien. En attendant, je bosse pour une boîte de cours privés, ce qui m'évite de postuler à la fn*c ou à carrouf et me permet de faire un peu ce pour quoi j'ai été (mal) formée. <br /> <br /> Les concours? Parlons-en. Le taux de réussite est minime (dans les 3 ou 4%) et la réussite au concours, dans la fonction publique territoriale, ne garantit pas l'emploi. Tu ne trouves pas de poste 2 ans après la réussite au concours, tu perds le bénéfice de celui-ci. Or, pour trouver un poste, on te demande... de l'expérience dans le domaine. On appréciera l'absurdité de la chose quand il est question d'un concours externe...<br /> <br /> Il n'y a pas un jour où je ne me dise pas que j'aurais dû essayer d'être titularisée. Et pourtant, je sais que c'était physiquement impossible. Peut-être que je me complais aussi dans mes malheurs, qu'il faudrait que je passe à autre chose. Mais si j'avais un poste en bibliothèque depuis la rentrée, je pourrais passer à autre chose. Encore faudrait-il que l'on me donne ma chance! <br /> <br /> Pour revenir à ce livre, je ne l'ai pas lu et ne compte pas le faire. Je dirais juste que je comprends son aigreur. Certes, il faut réfléchir aux débouchés avant de choisir une voie. J'ignore si elle avait un projet au départ. En tout cas, j'en avais un. Je me suis plantée, n'ai pas été aidée, et je le paie cher encore aujourd'hui...<br /> <br /> Bonnes vacances!
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