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12 mai 2013

L'oeil, l'humilité et la patience

Il ya quelques semaines, j'ai retrouvé en rangeant mon bureau mon vieil appareil photo. On me l'avait offert il y a bien longtemps de cela, je devais avoir douze ou treize ans, par quelqu'un que j'aimais profondément, emporté depuis par la maladie. Il m'avait offert en même temps quelques disques des Beatles : Abbey Road, Sergent Pepper's, Let it be, l'album blanc... Près de vingt ans plus tard je connais ces albums sur le bout des ongles, l'appareil est toujours là.
Sans le savoir, la photographie est progressivement devenue une affaire de famille, un pan de mon adolescence. Si mon oncle ne m'avait pas offert ce petit réflex, si mon père n'avait pas eu de laboratoire de photo étant plus jeune, je n'aurais probablement pas pris goût à cette activité. Il faut croire que nos activités favorites ont un relent œdipien.
Depuis, les années ont passé, la technologie a avancé, et donc la facilité a pris le dessus. Cela faisait cinq ou six ans que je me contentais de photos plates, pratiques, sans recherche, avec un petit bridge numérique. C'est pour cela qu'un pincement au cœur m'a pris en retrouvant ce souvenir. J'ai donc décidé de recycler mes objectifs et de m'y remettre. Pour une fois que la technologie est bien conçue, il aurait été dommage de ne pas en profiter. J'ai donc trouvé un nouveau réflex numérique premier prix, exactement le même que le précédent, pour y remettre mes objectifs.
Et roule. Y a plus qu'à maintenant, silencieusement poussé par les clichés que quelques amis publient régulièrement sur Facebook. Olivier, Mathias, Laurent, Camille, par exemple.

IMAG1085

On m'a appris à réfléchir avant d'appuyer, à composer sa photo avant que de la prendre. « Une photo coûte cher, en matériel, en pellicule, en papier. Ne déclenche pas si tu n'es pas sûr de ton coup. » C'est idiot mais j'ai encore ces conseils en tête, tout en sachant pertinemment que la donne est différente. « Attends toujours, compte jusqu'à trois avant d'appuyer. Pas de piéton qui traîne ? De fil électrique inutile ? » Et je compte jusqu'à trois en surveillant ça. « Pas de photo SPLAF des dimanche en famille, l’œil est instinctif et suivra les grandes lignes. Offre un chemin au regard de celui qui regardera ton travail. Offre-lui un chemin, mais un chemin praticable. Une ligne ou deux, pas plus. Tu as moins de deux secondes pour capter ton spectateur » Autant de préceptes que le photographe de mon village m'avait donnés. « L'important n'est pas ce que tu photographies, mais l'inflexion que tu feras subir à ton sujet. Ce n'est pas le sujet qui compte, c'est la qualité de ton regard. » Joignant le geste à la parole, il m'avait fait passer l'après-midi à photographier un savon mouillé... Combien de fois suis-je reparti, découragé, furieux, vexé, quand tous mes clichés étaient impitoyablement décortiqués, bafoués, critiqués... Mais au fil des années, j'apprenais, j'assimilais. « Le matériel n'est rien. Un bon objectif suffit, le reste c'est l’œil, l'humilité, la patience, la réflexion. » Et je m'en suis détaché, j'ai appris à travailler seul. J'ai même été prof de laboratoire au club de photo de ma fac. Ca arrondissait les fins de mois, tout en me permettant d'apprendre ce qui deviendrait mon métier.
J'ai dû en oublier une bonne partie, de ces cours improvisés au comptoir du magasin de photographie mais ils sont ancrés dans l'appréhension, dans le geste. Je ne sais ce qu'est devenu le photographe en question. Le temps passant j'ai « grandi » : la fac, les concours, les déménagements, le boulot... Et j'ai remisé mon appareil, lassé des coûts de pellicule et de papier, vaincu par toutes les mauvaises raisons qui poussent à renoncer. Grandir, c'est durcir, il faut croire. Après on mûrit et on revient aux amours d'antan. La boutique est maintenant fermée, comme je l'ai constaté la semaine dernière, je ne sais ce qu'est devenu le photographe. Mais tout ce qu'il m'a appris n'est pas mort, ses conseils reviennent à ma mémoire en me baladant sur un marché, dans un château, en arpentant mon village, dans les rues de Paris... Les choses sont plus simples maintenant. Il suffit de trier, et d'effacer ce qui ne plaît pas. Le ratio de clichés acceptable est toujours aussi dérisoire. De l'ordre de trois ou quatre pour cent. C'est ridicule. J'espère juste que cette proportion augmentera, et que j'y prendrai toujours autant de plaisir.

Commence à poindre l'envie de transmettre quelque chose.
Créer un club de photographie au lycée, par exemple ?
En attendant je rouvre la section "album photos" de ce blog pour y mettre quelques images. J'attends vos critiques.

 

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Commentaires
C
Hâte de voir tout ça Dude !
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